1945  de l'ALSACE à l'AUTRICHE

5 novembre

L'ultime défi de la 1re Armée Française

d'après le livre "Les vaincus seront les vainqueurs" de J.-C. NOTIN, éd. Perrin.

29 avril 1945.

L'Autriche se dresse enfin devant la 1re Armée. Les troupes françaises sont à 20 km à l'est du lac de Constance. Mais une nouvelle vient gâcher leur effort: les Américains seraient à Imst, soit 40km plus au sud. Si l'information est exacte, la course serait perdue d'avance pour les Français. Les Américains accouraient les premiers à Landeck et ce serait eux qui iraient faire la jonction avec les troupes d'Italie.

De Lattre n'a d'autre choix que de prôner la vitesse. "Poussez tant que vous pouvez sur Landeck par Bregenz et tous itinéraires. Il s'agit d'arriver les premiers à Landeck et de s'assurer la route du Haut Adige, par le col de Resia". Il demande au général Sudre, commandant la 1re DB de former un détachement aussi mobile que puissant. "Il s'agit de foncer à travers le Tyrol d'un seul bond, jusqu'au cœur de l'Autriche, en grattant et doublant les Américains".Traversant les lignes de la 44e division américaine, la colonne aborde en pleine nuit le col autrichien du Fernpass.

Les paysages du Fernpass

Ils y trouvent des Allemands, de la division Edelweiss, bluffés par cette colonne roulant sans méfiance. Leurs canons de 88 placés en enfilade allument les automitrailleuses de tête. Le bilan est sévère: 9 chasseurs grièvement blessés ainsi que le commandant Terrasson. Le reste des hommes s'est mis à l'abri. Surgit un général américain débonnaire qui sermonne les Français. "Si vous m'aviez consulté au dernier village que vous avez traversé comme des dingues, je vous aurais déconseillé de continuer: nous avions déjà eu un petit ennui hier soir en découvrant cet obstacle!" Il propose aux Français de reculer et de pilonner la zone à midi précises le lendemain.

« Ici la 1re armée française est entrée en Autriche le 29 avril 1945 » Source ECPAD

FERNPASS

Vers Col de Resia

7/5/45

Le 29 avril, le général Schlesser s'avance vers Lindau et Bregenz. Le 1er mai, il s'empare de Bregenz, encore tenue par quelques éléments nazis faisant régner la terreur dans la ville et fusillant sur-le-champ les Autrichiens sortant leurs drapeaux blancs. A Bregenz, les hommes du général Schlesser doivent se contenter de l'accueil chaleureux de la population, sans s'attarder. Il faut foncer vers l'Arlberg afin de basculer ensuite vers l'Italie. Mais les Allemands ne leur facilitent pas la tâche. Tous les ponts sur la Bregenzer Ach ont été détruits. Le Génie rend praticable aux chars des poutrelles au-dessus du cours d'eau large de 100 m.

Le 3 mai, les Français sont à Dornbirn, où ils sont reçus avec des gerbes de lilas. Puis à Feldkich et au Liechtenstein. L'accueil de la population autrichienne est partout enthousiaste. Mais les habitants laissent toutefois planer une lourde menace: les SS seraient barricadés dans l'Arlberg. Les Français atteignent Bludenz où ils se livrent en effet à un combat face à des SS déterminés. A 14h le col de l'Arlberg se dresse à l'horizon. Devant eux une troupe de fanatiques écrivent sur les murs et l'asphalte depuis plusieurs dizaines de kilomètres "Sieg oder Siberien" (la victoire ou la Sibérie). Assis sur les plages arrières des Sherman, les légionnaires de la 2e Cie portée du RMLE sont chargés d'ouvrir la route et entreprennent la montée du col. La route en lacets, encaissée entre deux montagnes est parfaite pour les embuscades, et des tapis de mines sont posés sur le bitume. Les snipers abattent plusieurs chefs de chars dressés à leur tourelle. Tous ceux qui se hasardent à sortir leurs jumelles sont descendus. Les légionnaires se couchent près des chenilles. D'autres sont chargés de servir d'appât pour localiser la provenance des tirs. Quinze ennemis sont fait prisonniers, des recrues de la Wehrwolf, âgés, en civil, mais équipés du dernier modèle de fusil à lunette Mauser d'une redoutable efficacité à 500m.

Au matin du 5 mai, les hommes du 1er Choc, appelés en renfort, abordent une petite gare, puis un tunnel à l'entrée barricadée. Les tirs ennemis reprennent. Après plusieurs tentatives et de nombreuses pertes, le commandement opte pour un "train blindé", récupéré par Schlesser à Bludenz, armé de deux mitrailleuses. Couverts par deux autres compagnies de Choc, les Français atteignent Dalaas. L'Arlberg s'ouvre aux Français.

Le 6 mai les Chocs s'approchent du col. St Anton puis Landeck, se situent de l'autre côté. Pour les atteindre, il faut emprunter un tunnel long de 10 km, que les Allemands ont obstrué avec un train déraillé. Le lieutenant-colonel Gambiez, commandant la brigade de Choc, s'est rendu sur place pour appuyer ses troupes. Il commence à planifier une opération lorsqu'il reçoit un appel téléphonique de commandant de Castries. Ce dernier explique que l'un de ses détachements est déjà à St Anton! Comment cela serait-il possible, se demande Gambiez: l'unique route qui aurait permis d'y accéder passait par le Fernpass, qui a été barré aux Français !

De midi à 13 heures, le Fernpass est secoué par des centaines d'obus de tous calibres aux tirs ajustés par les Piper Cubs. Le général américain prévient cependant les Français qu'ils ont ordre de rester sur place. Autrement dit les Français ne sont pas autorisés à franchir le col. Dans la journée du 1er mai, de Lattre s'est en effet vu notifier une nouvelle limite entre son armée et la 7e armée américaine.  Landeck, son objectif n°1, carrefour capital vers l'Italie, lui a été retiré au profit des Américains.

Le Fernpass leur étant désormais interdit, les Français doivent se contenter de contrôler la zone arrière autour d'Immenstadt. Ils y subissent d'ailleurs de sévères pertes.

L'entrée des Alpes autrichiennes est fermée aux blindés français du côté de la 1re DB mais la 5e DB peut encore espérer percer le long du lac de Constance, par Bregenz et le massif de l'Arlberg.

LA SUITE de l'incroyable épopée

A Feldkirch / ECPAD

Un livre que je vous recommande vivement !

J.C. Notin, éd.Perrin