1944 VOSGES ALSACE

LA MORT DU GENERAL BROSSET

Il repart a fond de train vers Giromagny au volant d'une jeep empruntée. Il s'écria plusieurs fois  « la vie est magnifique ! ». (…)

A la sortie de Plancher-le bas, les fils d'un pylône tombé a terre s'enroulent dans les roues Il doit s'arrêter. Mais il ne veut pas attendre que son chauffeur ait dépanné. Il arrête une jeep du DCR, prend le volant, le chauffeur a coté de lui. JP Aumont s'installe à l'arrière.

« Pourquoi riez-vous ? lui demande Brosset 

-parce que vous avez la figure couverte de boue

-c'est çà qui est merveilleux ! » lui répond le général.

« Au moment de partir, le chauffeur sergent du DCR lui dit : « méfiez-vous, mon général, le jeep déporte à gauche quand on freine. »Brosset ne répond pas et démarre en trombe. Un kilomètre plus loin, il arrive a cent à l'heure au pont de Rabin, où il s'était longuement arrêté le matin.

« Attention, le pont est miné ! » lui crie JP Aumont. Brosset freine et donne un coup de volant pour éviter un fourneau de mines, la jeep dérape sur la chaussée glissante, heurte de parapet du pont et culbute dans le ruisseau en crue.


JP Aumont et le sergent peuvent se dégager avant que la voiture ne soit submergée. Mais Brosset probablement assommé par le choc reste dans l'eau. Des sapeurs qui travaillent sur le pont se précipitent et tentent de sortir la jeep.

JP Aumont, a moitié groggy sur la berge a, l'espace d'un instant la vision du général , « raide, immobile à son volant ».

Puis il bascule et est emporté par le courant. Plus bas, d'autres sapeurs essayent d'arrêter son corps en formant la chaîne dans l'eau.

Ils parviennent à l'agripper, mais la violence du courant est telle qu'il leur échappe et part a la dérive dans les remous. On ne le retrouvera que deux jours plus tard près de Champagney. »


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« Grand, la poitrine large, tout en muscles, il a quarante-cinq ans, la carrure d'un athlète et la puissance d'un joueur de rugby. Il pratique tous les sports mais il a une véritable passion pour l'automobile, surtout la jeep, qu'il conduit toujours lui-même et à toute vitesse.

(…)Il avait longtemps couru le désert de Mauritanie, à la tête d'un peloton méhariste, trouvant même le temps d'écrire un roman ; « Un homme sans l'occident ».

Les Vosges 20 novembre 44.

« Ce matin-là, Brosset quitte son PC de Melisey vers 7 heures. Il est radieux. Tout marche bien dit-il, nous serons ce soir à Giromagny. Comme chaque jour, il roule vers ses brigades dans le froid humide, en short comme toujours, et conduisant lui-même sa jeep découverte. A coté de lui, son aide de camp, JP Aumont, emmitouflé dans sa capote et Pico, son chauffeur, à l'arrière.

« Nous fonçions, raconte JP Aumont, et tout aussitôt, dans le petit matin, nous commencions à chanter. N'importe quoi, Sambre et Meuse, Vous n'aurez pas l'Alsace et la Lorraine». Pour aller plus vite d'une brigade a l'autre Brosset traverse le no man's land par les bois et les taillis. Ses compagnons, pas très rassurés, pointent les armes, prêts a tirer.(…) A 10 heures, il est à Champagney. Il a déjà fait la tournée de ses groupements, pour les stimuler, les pousser en avant.(…)

Dans les villages, les paysans n'arrivent pas a croire nous sommes français. Ce n'est que quand ils voient Brosset qui porte un képi de campagne qu'ils fondent de joie. Ils embrassent Diego. C'est à qui sortira ses réserves de bouteilles de framboise ou de prune… tout le monde boit au succès. (…)

Pendant ce temps Brosset est parti rejoindre les chars devant Giromagny . Il roule a toute allure comme d'habitude. Cette fois, il manque un virage et verse dans le fossé. Il s'en sort indemne mais la direction de sa jeep est cassée.

Cet accident n'entame nullement l'allégresse de Brosset. Il exulte de voir sa division avancer aussi vite : « nous serons ce soir à Giromagny », répète-t-il.

Sources

« La 1ère DFL », Yves GRAS et « Souvenirs provisoires » de J.-P. AUMONT

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